Les Essences de bois
Avant de découvrir la surprenante diversité du mobilier créé pour Chandigarh, il convient de se remémorer le contexte historique dans lequel il a été conçu.
Aux antipodes du regard condescendant que posent de nombreux occidentaux sur le sous continent indien, Le Corbusier et Pierre Jeanneret s’affirment indubitablement plus pragmatiques qu’idéologues.
Là où d’autres suggèrent des solutions encore imprégnées d’une vision colonialiste, ils optent pour un positionnement avant-gardiste à une époque où l’on ne parle pas encore de circuits courts, d’écologie ou de développement durable.
Sans pour autant négliger la dimension financièrement profitable du recours à des supports indigènes, l’utilisation des ressources de l’économie locale permet de proposer des réponses d’une rare modernité.
Infiniment plus souple qu’une ligne de plasturgie ou qu’une unité de fabrication industrielle de meubles métalliques, des ateliers de menuiserie même de taille relativement modeste accentuent les bénéfices d’une implantation géographique de proximité immédiate, d’une adaptabilité instantanée et d’un mode d’usinage à dimension humaine qui fait que les produits réalisés conservent une qualité de confection artisanale.
Comme le teck imputrescible et bon marché qui comble l’essentiel des besoins, le second bois dur connu sous l’appellation vernaculaire de palissandre indien, le “Sisso” ou “Sheesham” se révèle disponible en quantité importante et s’avère parfaitement approprié aux exigences particulières de l’ébénisterie.
Outre le fait qu’ils repoussent naturellement les insectes xylophages, les espèces choisies nécessitent peu d’entretien, acquièrent avec le temps une patine incomparable et se plient remarquablement aux amplitudes hygrométriques et hydrométriques notamment en période de mousson.
Pour ce qui concerne les autres modèles en bois massif, bien qu’il n’apparaisse que rarement, l’anacardier offre des possibilités avantageuses.
Des manguiers centenaires fournissent d’imposants plateaux de tables résolument novateurs, ainsi que les structures de nombreux sièges à garnir.
Il est à noter que d’autres matériaux comme le bambou ont été utilisés exceptionnellement pour des prototypes ou du mobilier d’extérieur, surtout dans la première période de conception du mobilier.
Du fait de sa légèreté, le cèdre est adopté dans la fabrication de lits (daybed) et ses qualités de bois tendre sont exploitées pour la réalisation des plateaux de bureaux habillés de cuir ou de simili permettant un usage quotidien dans des conditions optimales.
Par ailleurs, l’espèce sert majoritairement de bâtis pour des exemplaires recouverts de feuilles de placage de teck.
Dans tous les cas, ces différents ligneux sont habilement travaillés en fonction de leurs caractéristiques spécifiques.